les rois de la jungle
Chapitre II
Steven survolait la canopée, attentif à un mouvement ou un signe de vie dans l’épais manteau émeraude de Fourtou.
La présence de tant d’animaux, en-dessous et au-dessus de lui, exacerbait sa prudence ; il y avait beaucoup trop de prédateurs dans cette forêt, et le plus frustrant, c’est qu’il ne pouvait juste pas lâcher du lest sur leurs têtes pour les neutraliser. Cette technique ne fonctionnait que sur les humains, diablement efficace au demeurant, mais inutile contre les grosses bêtes quand le Type-Sympa-Aux-Cheveux-Roses n’était pas là pour le protéger.
En-dessous de lui, les arbres se clairsemèrent peu à peu pour laisser deviner une clairière ; et une présence humaine. Environ dix personnes (ou cinq ? ou quinze ? Steven n’était pas fort en maths). Les têtes de ses occupants apparurent dans le regard de Steven comme tant de petites cibles ambulantes.
Ils coupaient du bois pour faire un feu, et avaient construit des petits nids pour humains sous le feuillage d’un arbre. Vu la tronche de leurs habits, ce n’était pas une tribu locale - aucun humain ne pourrait survivre bien longtemps à Fourtou, et surtout pas des humains avec cette corpulence et ces habits-là : Steven savait reconnaître des marins quand il en voyait. Ceux-là étaient dans la forêt depuis une semaine environ, à en juger par l'état de leurs habits et les dispositifs de survie qu’ils avaient installé. Il avait déjà trouvé une partie de l’équipage ! Pas mal, hein ?
Steven fondit glorieusement vers le campement, et se posa grâcieusement sur un pilier de bois, agitant ses grandes ailes d’albâtre pour attirer l’attention des humains.
- Y’a une mouette, fit l’un des rescapés.
- Kweeh ! Kweeh kweh kweh ! (Salutations, chers concitoyens. Vous vous demandez probablement ce qu'une mouette fait aussi loin du rivage et aussi près du sol. Malgré l'irrésistible tentation de voler le peu de possessions terrestres qu'il vous reste, il s'avère que je fais partie d'une escouade de sauvetage dépêchée par la Marine pour vous porter assistance. En conclusion, je suis là pour vous sauver. Suivez-moi, individus au cerveau peu développé, et rejoignez vos semblables.)
- Super. Passe-moi la lance, Tim ! Ça fait une journée qu’on a rien eu à bouffer.
- L’embrocher ? Non mais ça va pas…
- … il faut la faire mariner avant.
- …Kweh ?
Deux paires de mains se posèrent sur Steven et ligotèrent ses serres ensemble, profitant de l’effet de surprise. Un troisième saisit un gourdin et l’assoma dès qu’il commença à se débattre.
- Les gaaars ! Ce soir... c’est mouette braisée aux champignons !
- Ouaiiiiiis !!
Déchiffrer une situation correctement ne faisait pas partie de l'arsenal de compétences de Steven. Mais, avant de sombrer dans l'inconscience, il songea tout de même que ça sentait pas très très bon pour ses plumes.
solo résumé : Steven, parti en éclaireur, tombe sur une partie des naufragés. Il réalise trop tard qu'il est incapable de communiquer avec eux et se fait capturer par les naufragés dans l'optique de devenir le repas du soir.