D'un geste las, tu ajustes la montre élégante à ton poignet. La trotteuse parcourt à toute vitesse les derniers crans qu'il lui reste avant la prochaine seconde. Six, cinq, quatre, trois, deux, un. Une cloche retentit. Sans te précipiter, tu te lèves et avances jusqu'à la porte de la salle de classe. Baissant la poignée, tu tires celle-ci en arrière et laisses entrer la vingtaine d'étudiants sous ta responsabilité pour la journée. Ils discutent un peu mais s'installent rapidement derrière leurs tables, s'asseyant et rangeant leurs affaires. Après une ou deux minutes, tu refermes la porte et d'une voix chaleureuse et passionnée, tu commences ta comédie quotidienne. ▬ Bonjour à tous. Les étudiants se lèvent et le silence retombe. Asseyez-vous. Tu fais quelques pas, traversant la salle d'un bout à l'autre. Aujourd'hui, nous allons continuer le cours sur l'art et la folie. L'autre fois, nous avons vu les définitions larges de ces deux termes et pendant ce chapitre, vous apprendrez comment ces deux notions peuvent fonctionner ensemble, et donner parfois des résultats surprenants. À la fin de cette annonce, tu frappes deux fois dans tes mains et les élèves s'activent, habitués à ta propre routine.
Chacun connait son rôle. Ceux qui doivent le faire se lèvent pour chercher le matériel, comme le Den Den Mushi projecteur ou l'écran de toile blanche. Ceux dont les tables sont au milieu les écartent vers les bords de la salle. Tandis que toi, tu vas chercher ton mètre pointeur, que tu déplies d'un coup sec. Gwenn, celui qui s'occupe de l'escargot, se place juste derrière, prêt à passer les diapositives que tu as rangé dans le bon ordre et dans différentes catégories et sous-titres ce matin-même. Presque nonchalant, et sans oublier de sourire à ta classe avant de commencer, tu t'assied sur le rebord de ton bureau et commences à faire ton cours avec passion, comme si tu n'avais vécu et ne vivrais jamais que pour ça.
Il faut bien avouer que c'est dans ce genre de missions que tu excelles. Tu n'es pas l'homme le plus discret, par ta taille et ton physique, mais tu sais te fondre dans la masse à la perfection, quand tu as l'esprit clair. Cela fait déjà plusieurs semaines que ton binôme et toi êtes arrivés dans cette école pour en percer les secrets. Elyria, d'ailleurs, est une recrue prometteuse. C'est sa première mission sur le terrain. Tu te rappelles avec nostalgie ta propre première mission, dans ce même royaume. Mais elle n'avait pas grand chose à voir avec celle-ci. Tu en étais ressorti fier comme un paon, l'intérieur de ton costume décoré de ton badge du Cipher Pol.
Le cours se déroule sans efforts. Les élèves dont tu dois t'occuper - ceux que tu dois également surveiller - sont cultivés et intéressés. Même les moins bons de la classe font de leur mieux pour écouter et prendre des notes. Pendant la journée, tu entres complètement dans la peau du gentil personnage du Professeur Markus, enseignant d'histoire de l'art. L'escargophone noir à ton poignet, lui, enregistre tout ce qu'il pourrait se passer dans ton dos, pendant que toi, Tom, prend notes mentales des comportements et agissements de chacun. Ces notes, tu les reportes avec attention dans un carnet que tu conserves dans ta chambre d’hôtel, où t'attendent tes filles chaque soir.
En attendant, les heures défilent, le soleil fait son chemin jusqu'au zénith, et la cloche sonne à nouveau. C'est l'heure du repas. Le cours reprendra là où vous le laissez après manger, mais pour l'instant, les élèves et toi-même devez vous rendre au réfectoire. La discipline de ta classe te permet de prendre ton temps ; ils ne partiront pas sans toi. Sorti le dernier, tu verrouilles la porte de la salle et une fois le trousseau rangé dans la poche de ton costume noir et ton chapeau reposant à nouveau sur ta tête, ton index et ton pouce remontent pour friser ta moustache alors que tu lances sur un ton espiègle, le sourire aux lèvres. ▬ Allons-y toute la troupe.