Level up !
Anémone D. Victory
... Lieutenant …. Lieutenant !!!
Mes yeux s’ouvrent doucement sur le livre qui traîne sur ma tête tel un chapeau pas très beau. La voix qui me tire de mon sommeil n’est autre que celle de Cadona qui, malgré son grade, est de loin la meilleure aide militaire que je possède. Je me demande depuis combien de temps elle tente de me réveiller et si c’est urgent ou non. J’attrape sans aucune énergie l’ouvrage qui me servait de cache soleil et le referme. Mes iris aurores sont instantanément agressés par la lumière artificielle du bureau dans lequel je me trouve. Je secoue la tête à plusieurs reprises, gémissant bruyamment pour signifier le mécontentement que m’inspire ce maudit réveil.
... Lieutenant … Lieutenant !!!
Même ton, même intensité de voix, même accentuation des mots. Cadona est un véritable enregistreur dont la voix ne défaille ou ne change jamais. C’est effrayant mais moi, ça me fait beaucoup rire, du moins, lorsque ça ne me réveille pas. Je me redresse difficilement sur mon siège de bois acajou avant de m’affaler sur mon bureau. En plus de cet ouvrage de “De la navigation à l’artillerie, étude et analyse des retours d'expériences de la bataille du Delta de Bliss par le contre-amiral Sister”, mon plan de travail est recouvert de feuilles volantes tachées d’encre. Même si celà n’est pas amusant, pénible et un peu douloureux sur les bords, j’essaie de travailler le plus possible pour être une bonne sous officière. Une heure trente d’étude, huit de sport. C’est le ratio impeccable que je me suis imposé pour ne pas faire honte au commandant.
Je redresse la tête, toujours sans énergie, en direction de mon soldat de première classe, curieuse de ce qu’elle souhaite me dire depuis un moment déjà. Sa bouche s’ouvre une nouvelle fois face à ma lenteur, et menace de repartir dans une dizaine de “Lieutenants … Lieutenants”. Face à cette situation de danger je l'interromps en m'avançant à son niveau et en lui mettant les mains sur les épaules.
Oui oui ! Je suis réveillée … Qu’est ce que tu voulais me dire ?
Oh, bonjour Lieutenant … Vous avez bien dormi ?
Je pousse un long et bruyant soupir, marque de fabrique de Victory Industries, tout en me grattant la tête.
C’est difficile de lire des Retex et de pas s’endormir je t’avoue ! Mais je pense que cette sieste m’a fait du bien. dis-je en baillant
La jeune marine aux longs cheveux cachous hoche doucement la tête avant de continuer.
Le commandant veut vous voir, il dit que c’est urgent.
Je déglutis. Je n’aime pas trop ce genre d'appels ! D’habitude, celà veut souvent dire que je pars sur le terrain, tout de suite, maintenant. Aucune préparation, juste un petit marathon dans les montagnes avant la nuit. Je hoche doucement la tête avant de me mettre en route.
L’avantage d’être la personne la plus cool de la marine, c’est que les bâtiments ne sont pas un problème pour moi. Je monte et descends d’étages sans me soucier de l’emplacement des escaliers. J’ai simplement besoin de me laisser couler et entre nous, c’est bien rigolo. Je traverse ma chaise, quelques murs et deux étages avant de me glisser jusqu’à l’entrée du commandant. A peine ai-je le temps de toquer qu’il m’invite à entrer et à m’installer. Chouette ! Je déteste attendre et je déteste les surprises. Plus vite je pars en mission, plus vite je rentre.
Je m’avance dans la capitainerie lumineuse et rangée au carré avant de m’installer sur un siège similaire à celui présent dans le bureau des lieutenants. L’épaisse stature du commandant est assise devant moi, les mains croisées sur son visage en arborant la même expression que d’habitude. Un visage dur, sévère et professionnel. Devant lui, pas de rapports de mission précédentes, d’avis de recherche ou de longues cartes impossibles à lire, simplement une petite lettre estampillée du sceau bleu de Frauce de la marine. J’observe ce petit papier immaculé d’un air interrogateur, cherchant une explication auprès de mon superieur.
Une lettre ça se lit Anémone. dit il d’un ton sec et moralisateur
J’agite la tête rapidement m’empressant de sortir le papier et de le lire. Une lettre longue, imprimée avec le plus grand soin, qui renferme une quantité aberrante de vocabulaire pompeux et technique. Quelle plaie. Lieutenant D. Victory … plaisir de vous annoncer … East blue… Au bout de quelques lignes, je me stoppe sur un petit groupe de mots qui me tient en haleine. Je le lis, relis, re-relis, avec ou sans passer le doigt.
Promue au grade de commandant… dis-je en murmurant
Je suis bête, certes, mais les mots ici sont simples. Leur sens aussi est simple, et pourtant, j’ai l’impression de ne pas comprendre ou du moins, de mal le faire. Tous mes efforts auraient payés ? Enfin ? Je relève la tête vers le commandant d’un air timide. Ne cherchant pas ici le soutien de mon supérieur, mais celui de la figure paternelle qui s’occupe de moi depuis mon entrée dans la marine. Ma vision se trouble et malgré mes efforts pour m’essuyer les yeux d’un revers de la main, je garde le regard humide. Les mains de mon mentor s’abaissent, révélant un sourire anormalement doux et fier.
Félicitations gamine, tu prends du galon.